par Aurélien Chapuis aka Le Captain Nemo
Chaque hiver, c'est la même : Le bonnet Carhartt WIP apparait partout dans nos feeds insta, sur la tête des stars comme des personnes stylées dans notre rue. Basique incontournable, il fait parti des meilleures ventes chaque année et reste une pièce iconique de nos vestiaires, simple et on ne peut plus efficace. Mais comment est née cette tendance qui n'en finit pas ? Comment ce bonnet s'est imposé durablement dans la pop culture via ces courants alternatifs pour ne plus jamais en ressortir ?
Ce fameux bonnet a été produit pour la première fois en 1987 par la branche historique américaine de Carhartt. A l'origine, il est totalement adopté comme vêtement de travail dans le monde de la construction, celui du transport ou celui de l'agriculture. Il est facile à décliner avec l'identité de l'entreprise, tous les ouvriers en extérieur en font leur étendard.
A cette même période, le Hip Hop américain s'empare largement de la marque dont ce fameux bonnet qu'on retrouve sur la tête de Treach du groupe Naughty By Nature, Prince Paul de De La Soul, Prodigy de Mobb Deep ou Nas pour cette photo iconique.
C'est aussi à cette période qu'Edwin Feah commence à importer ces vêtements en Europe, sentant qu'une tendance de fond était en train de s'installer. Au milieu des années 1990, il lance petit à petit la division Carhartt Work In Progress pour développer en Europe des vêtements adaptés aux skateurs, aux graffeurs et aux proches de la culture Hip Hop. C'est un peu ce qu'il s'est passé aussi avec les sacs à dos Eastpak à la même période, repris tels quels par le monde de la rue avant d'être adaptés à cette culture et ces usages.
Le bonnet est resté pour l'essentiel le même que celui de 1987, même si la version WIP utilise des matériaux légèrement différents, adaptés au streetwear. Et un marqueur générationnel majeur va l'installer totalement dans la culture en France : La Haine. Réalisé en 1995 par Matthieu Kassovitz, ce film est un condensé stylisé de la vie en banlieue parisienne dans les années 1990 entre Hip Hop, violences policières, ségrégation et ennui de la jeunesse.
Et parmi les accessoires les plus en vue du film, un des personnages, Hubert, porte très souvent un bonnet Carhartt, synonyme d'authenticité, de qualité et de proximité avec la rue. Vrai symbole visuel de la jeunesse entre rap et révolte, La Haine est un tel phénomène de société que le bonnet Carhartt en deviendra presque un emblème.
Le bonnet Carhartt traverse ainsi le temps avec de nouveaux coloris et toujours son logo en étiquette pendant les années 1990 et 2000. Mais c'est surtout au début des années 2010 qu'il prend encore un nouvel essor avec sa réappropriation par des artistes extrêmement en vue à ce moment là comme A$AP Rocky, Kendrick Lamar ou même Rihanna.
Quand ils le portent, il pensent à toute la dynastie qui les précède de Nas à 2Pac, l'authenticité qui se dégage de la marque et son adaptation toujours utilitaire, gage de qualité. Le bonnet Carhartt est stable, c'est une valeur sûre qui représente une culture mais aussi un style de vie, une simplicité remarquable.
A ce moment là, les frontières entre le monde de la musique et celui de la mode sont de plus en plus minces. Kanye West, Pharrell Williams, Virgil Abloh, A$AP Rocky, tous ces artistes jouent avec les codes de la mode pour l'infuser de culture de la rue. Dix ans après, ils se retrouvent à designer leurs propres collections dans des grandes maisons ou des marques légendaires, emportant avec eux leurs classiques, leurs éléments indispensables.
Et le bonnet Carhartt WIP est un parfait exemple de ce classique indémodable qui peut s'adapter à toute situation, dans la rue comme à la fashion week. Il devient encore une fois un incontournable de tous les vestiaires de streetwear, toujours à la bonne place, découvert via Nas au début des années 1990, La Haine en 1995 ou Rihanna en 2011. Il redevient chaque hiver à la mode. Et personne n'arrive à le détrôner.